Les débats sur la transition numérique mènent régulièrement à des interrogations sur l’impact qu’elle aura dans tous les domaines, secteurs, fonctions de l’économie et voire même sur la société en général. Nous vous proposons de vous interroger sur cette (r)évolution qui va probablement vous surprendre par son ampleur.

État des lieux

Jusqu’ici vous avez entendu parler d’économie collaborative, d’éclatement des ‘silos’, de management horizontal ou encore d’omnicanal. Vous comprenez plus ou moins qu’ils ont un rapport avec l’arrivée à maturité des usages des nouvelles technologies et l’accessibilité facilitée par le déploiement des smartphones et des réseaux de télécommunication. En effet, la transition numérique engendre bien des bouleversements aujourd’hui dans notre monde ultra connecté. L’arrivée de nouveaux acteurs dit ‘disruptifs’ ne serait rien sans ces technologies. Mais comme tout changement, ils entraînent avec eux leurs consommateurs dans de nouvelles façons de consommer. Et grâce à la digitalisation de toutes les connaissances possibles et imaginables, nous pouvons désormais avoir accès de n’importe où, n’importe quand et depuis n’importe quel appareil connecté, à toutes les informations, services ou produits disponibles sur internet.

Cela change bien des choses dans la perception du monde dans lequel nous vivons. Les potentialités liées au numérique n’en sont qu’à leurs prémices. Prenons un exemple que tout le monde connaît et sur lequel tout a déjà été dit : UBER. S’il fallait résumer cette entreprise, nous pourrions tout simplement dire qu’elle met à disposition des usagers des voitures avec chauffeurs. Toutefois, si on s’intéresse un peu plus à la stratégie de cette entreprise, on comprend rapidement le potentiel disruptif qu’elle représente pour d’autres secteurs que celui des taxis. Pour se développer, elle prévoit en effet de radicalement modifier nos comportements liés au transport. Aujourd’hui propriétaire d’une voiture, demain nous serons tous consommateurs de trajets grâce aux voitures, bus ou camions autonomes qui nous transporteront nous, ou des produits, d’un point A à un point B sans aucune intervention de l’homme. Les conséquences seront multiples et affecteront de nombreux secteurs de l’économie classique : les constructeurs automobiles vendront de moins en moins de voitures, les loueurs de voitures n’existeront tout simplement plus, les sociétés de transport de marchandises verront leurs marchés attaqués de toutes part… L’entreprise à déjà commencé à développer de nouveaux services. En effet, Uber a lancé une solution de livraison de repas (UberEats) ; en test également dans quelques villes des États-Unis, la livraison de marchandises en quelques heures (UberRush). Tout ça grâce à son avance technologique mais également la flottille qu’elle fédère et qui lui permet un maillage très dense dans les villes où elle opère.

Il est difficile d’imaginer toutes les répercutions qu’auront les nouvelles technologies, toutefois il faut comprendre une chose : si les acteurs traditionnels continuent de fermer les yeux face à la concurrence qui s’organise et à ignorer ces acteurs émergents, ils disparaîtront et plus rapidement qu’on ne le croit. La force du digital est de pouvoir offrir désormais un service ou un produit directement à n’importe quel consommateur et pour un coût ridiculement faible, là où il fallait avant développer un réseau de magasins dans chaque zone stratégique.

Changement des comportements

Ces sociétés qui ‘ubérisent’ des secteurs entiers de l’économie, s’appuient donc sur l’usage des nouvelles technologies mais également sur le rapport à l’emploi des nouvelles générations. Nos grands-parents ont connu une entreprise toute leur vie, la génération de nos parents une même fonction dans plusieurs entreprises. Aujourd’hui les nouvelles générations cassent le code du travail : Indépendants, en Portage salarial ou Auto-entrepreneurs, ils ne laissent plus la société leur dicter ce qu’ils doivent faire. Ils ont conscience des difficultés pour trouver un emploi et n’hésitent plus à monter leur propre entreprise. A terme, nous vendrons directement, sous des formes salariales encore à inventer ou à adapter, nos compétences aux entreprises comme ce qui se fait de plus en plus chez les consultants ou les développeurs à travers des missions courtes, sur des projets bien précis. Les millennials auront donc probablement plus de clients que de patrons dans leur vie. L’émergence des modes de vie alternatifs comme les multiactifs ou les slasheurs, oriente vers une tendance de la reprise en main de leur avenir. Si l’envie leur prend de se former au développement informatique en même temps qu’ils écrivent des scénarios pour l’industrie cinématographique, ils peuvent se former gratuitement sur internet grâce aux MOOCs (Massive Online Open Courses) où il ont accès aux meilleurs professeurs du monde sur les sites comme Coursera ou Codeacademy.

Et s’il ne fallait qu’une preuve de cet engouement : le nombre d’espaces de CoWorking a explosé en quelques années. Pragmatique jusque dans leur façon de travailler, pourquoi auraient-ils des bureaux alors qu’ils peuvent les louer à la journée ? Les changements des usages entraînent la fin de la possession comme but ultime, c’est désormais avoir accès, collaborer, consommer différemment qui importe. Ce développement des espaces de travail partagés est majoritairement lié à la fin du salariat traditionnel. Les entreprises vont progressivement devenir des sociétés qui ne seront probablement constituées que d’une équipe dirigeante, le reste pouvant être confié à des indépendants. La transformation ayant débuté dans les métiers du tertiaire, c’est à dire des services qui pouvaient être facilement automatisés, touche désormais des métiers et secteurs plus traditionnels comme les transports.

Et c’est ici que se fonde la majeure partie des confrontations. Le temps de la révolution numérique n’est pas le même que celui de l’action politique ou de l’évolution des consciences. Comment mettre en place les outils législatifs sans freiner l’innovation ? Comment accompagner cette transition numérique lorsque l’on voit les courbes d’adoption des nouvelles technologies diminuer si rapidement ? Est-ce que nos sociétés arriveront à faire cohabiter anciennes pratiques et nouvelles générations ?

Les changements de comportements vont donc affecter le fonctionnement des entreprises qui devront s’ouvrir au monde. Cette ouverture s’accompagnera par un changement des méthodes de management, du rapport à ses salariés, de gestion des stratégies ou encore des techniques marketing. Les principes de ‘mode projet’, de pivot, d’agilité, de lean ou encore d’open innovation, pour les plus connus vont donc s’imposer.

penser innovation

Penser Innovation

Ne voyez pas seulement une mode dans ces nouvelles méthodes de travail. Elles ont déjà fait leurs preuves. Par exemple dans le développement de la fusée Falcon 9 de Space X, société détenue par Elon Musk, les développeurs de ce projet ont décidé de repenser entièrement le modèle économique. Ici, le coût des fusées étant le principal frein à leur commercialisation à plus grande échelle et à l’accès à ce marché, le milliardaire à fait travailler ses ingénieurs en mode projet pour inventer les technologies nécessaires pour récupérer le lanceur et ainsi pouvoir réutiliser ce module pour de nouveaux lancements. Ils ont ainsi pu réduire les coûts de fabrication et diviser par 4, pour le moment, le prix facturé comparé à un lancement depuis la fusée Européenne Ariane. Ce qui impressionne le plus est le temps que cette startup à mis pour mettre au point, tester et réussir à développer un tel bijou de technologies là il aura fallu des dizaines d’années aux programmes Américains ou Européens pour développer leurs fusées.

Imaginer de nouveaux business modèles n’est pas inné. Toutefois, les startups n’ont jamais été aussi nombreuses et créatives en France et dans le monde. Leur point commun, s’il en est un, est d’innover en créant plus de valeur pour les consommateurs. Cette valeur pouvant se matérialiser sous forme de réduction de prix, d’augmentation de la qualité ou d’accessibilité. Que se soit en supprimant les intermédiaires, en cassant les monopoles, en simplifiant les processus de fabrication, ou en utilisant les nouvelles technologies pour développer de nouveaux services et produits, ces sociétés démontrent qu’il reste encore beaucoup de travail aux entreprises classiques pour se mettre au niveau des enjeux de la transition numérique.

Qu’attendre à court terme ?

A quoi vous attendre dans les années à venir ? Tout dépendra de votre secteur d’activité. Il est fort à parier néanmoins que de nouveaux acteurs s’intéressent à votre segment si ce n’est déjà fait. L’observateur de l’ubérisation a rassemblé les principaux secteurs les plus impactés aujourd’hui à travers une cartographie intéressante. Chercheurs, économistes, dirigeants d’entreprise, c’est toute la société civile qui s’intéresse de plus près à ce phénomène pour comprendre et tenter d’imaginer la société de demain. Anticiper les prochaines opportunités économiques est bien sûr l’objectif de tout entrepreneur, encore faut-il suivre les tendances sans trop se focaliser sur un objectif de rentabilité à court terme. Amazon ne tire toujours pas de profit de son service de e-commerce malgré son chiffre d’affaire de 35,7 milliards de dollars en 2015 et son insolente croissance de plus de 20% chaque années. C’est une prise de risques qu’il est rare de voir en France ou en Europe, et encore moins une stratégie appliquée. Toutefois, investir dans le numérique est une obligation pour se transformer. On l’a vu, la concurrence est désormais mondiale et les barrières entre les différentes activités se réduisent.

La révolution numérique permet des innovations phénoménales qui n’en sont qu’à leur balbutiements. Si l’on pense aux potentialités du deep learning, du machine learning, des IoT (Internet of Things), de la 5G, de la montée en puissance de l’économie collaborative, de la révolution écologique, du Big Data, de la nanosanté, du Edge Computing, de la réalité augmentée ou virtuelle, etc… on comprend que le numérique va prendre une place de plus en plus importante dans les stratégies des entreprises. On estime d’ailleurs que 50% des métiers liés au numérique n’ont pas encore été inventés. Imaginez alors combien de services ou produits peuvent l’être ! A vous d’inventer le futur de votre entreprise !